Recension de « Bien-être scolaire : Des clés pour demain » de Fabienne Serina-Karsky (L’Harmattan, 2019) / Laurent Sovet

Dans cet ouvrage intitulé « Bien-être scolaire : Des clés pour demain », Fabienne Serina-Karsky mène une analyse approfondie et holistique d’un environnement scolaire s’inscrivant dans le mouvement de l’éducation nouvelle en interrogeant ses effets potentiels sur le bien-être des élèves. Elle restitue une partie de ses recherches réalisées dans le cadre de sa thèse en sciences de l’éducation soutenue en 2013 à l’Université Paris 8 Vincennes – Saint-Denis et ayant pour titre : « Pratiques éducatives et bien-être de l’enfant à l’école : La contribution de l’Éducation nouvelle (1910-2010) : Pour un nouveau paradigme éducatif ». À travers neuf chapitres, l’auteure explore des aspects spécifiques dans l’organisation structurelle et pédagogique d’une école parisienne tout en interrogeant régulièrement sa posture épistémologique ainsi que la place de la recherche-action et de l’innovation pédagogique en milieu scolaire. Elle y dévoile notamment son cheminement en tant que parent d’élève, étudiante, enseignante puis chercheure et les liens qu’elle tisse à travers ses identités successives. Les éléments d’argumentation et de réflexion sont le plus souvent accompagnés de références bibliographiques ouvrant à des lectures complémentaires.

La première partie est une introduction générale et historique sur le mouvement de l’éducation nouvelle et les lab schools, sur le concept de bien-être et sur les débats méthodologiques et épistémologiques que suscitent la recherche appliquée à l’école. Plus spécifiquement, l’auteure explique que la recherche et les politiques françaises se sont davantage focalisées sur la violence scolaire et les moyens de la prévenir que sur le bien-être à l’école et les moyens de le promouvoir au cours du XXème siècle. Ce schéma semble évoluer depuis plusieurs années où les initiatives visant à comprendre et favoriser les déterminants du bien-être à l’école se sont démultipliées. Si les cadres théoriques sont pertinents et s’inscrivent dans la pluridisciplinarité en abordant le bien-être à l’école notamment à travers le droit, la sociologie, la psychologie ou encore les sciences de l’éducation, il manque des éléments précis sur la définition de ce concept et les termes associés. Par exemple, l’auteure s’appuie la définition formulée dans une note de synthèse du Centre d’Analyse Stratégique (2013) où « le bien-être des élèves [est] entendu comme l’appréciation subjective de leur expérience à l’école » (p. 2). Or, il semblerait que cette approche hédoniste du bien-être – le bien-être subjectif – s’articule également avec des éléments relevant du bien-être psychologique et abordés à différents endroits de l’ouvrage. Florin et Guimard (2017) en donnent la définition suivante : « La conception eudémonique, quant à elle, s’intéresse davantage aux processus qui permettent d’accéder à un certain bien-être, c’est-à-dire à la capacité à disposer d’une certaine maîtrise sur sa vie et donc de se réaliser. Ainsi, contrairement au courant hédonique, cette approche examine surtout ce que font les individus (implication, sens donné à la vie, réalisation de soi, utilisation du potentiel), à la signification de leurs actes et à leur implication » (p. 21). Les débats méthodologiques et épistémologiques concernant la recherche-action et l’innovation pédagogique en milieu scolaire témoignent des réflexions complexes par lesquelles peut passer tout acteur de la communauté éducative qui souhaite repenser son terrain ou ses pratiques comme un objet d’étude. Ce dilemme peut s’entrevoir notamment à travers la question suivante : « En quoi ma position personnelle influence-t-elle mon rapport avec mon objet de recherches, et mon rapport aux autres ? » (p. 50). Ce changement de posture n’est pas toujours simple et relève d’un processus exigeant où l’expérience et la relation subjective à l’objet de recherche peuvent devenir des sources d’appui à son étude comme l’auteure le rappelle.

La seconde partie propose une analyse éclairée de l’organisation générale de l’École Aujourd’hui. Plusieurs aspects sont successivement abordés comme les dynamiques d’interaction au sein de la communauté éducative, l’organisation spatiale des lieux, les rythmes scolaires et extrascolaires, les événements majeurs qui s’organisent durant l’année scolaire, les postures pédagogiques, la formation des équipes ou encore l’ouverture de l’établissement sur l’extérieur. Cette vision à 360 degrés s’inscrit en cohérence avec le postulat initial de l’auteur où les pratiques éducatives doivent s’appréhender comme un système complexe suivant le modèle proposé par Morin (2001). Bien que l’objectif soit de rendre compte de cette complexité, le texte reste très fluide avec un effort pour mettre en lien chaque élément analysé. La démonstration est plutôt réussie car il devient évident au fur et à mesure de la lecture que les pratiques éducatives doivent se penser comme un tout et qu’une action globale pourrait avoir plus de poids que des actions isolées pour agir sur le bien-être des élèves. Il apparaît une volonté de donner du sens pour l’équipe éducative, les élèves et les parents où chacun trouve sa place et reconnaît celle de l’autre au sein de la communauté éducative. L’analyse s’accompagne d’éléments nuancés, voire ambivalents, qui montrent que certains aspects peuvent présenter des limites et doivent ouvrir à la réflexion. Par exemple, les pratiques éducatives sont associées à un investissement important de l’équipe éducative qui va au-delà du temps de travail initialement défini et qui peut se traduire par un sentiment d’usure comme cela est mentionné dans le témoignage d’une personne interrogée : « Je t’avoue que parfois je me dis « mais c’est pas possible d’être payée si peu pour faire autant d’heures de travail », alors je regarde ce que je pourrais faire d’autre, mais bon, ça me passe très vite parce que jamais je ne retrouverai ailleurs une aussi bonne ambiance de travail, et ça c’est le plus précieux … » (p. 83). Ces éléments illustrent que cette mise en sens des actions et des pratiques éducatives peut s’accompagner d’effets potentiellement délétères à long terme face à des conditions de travail particulièrement exigeantes (Sovet & Bernaud, 2019). Il s’agit de défis à relever au sein des établissements scolaires mais plus largement au sein du système éducatif. À ce propos, l’auteure fournit de nombreuses clés pour penser et accompagner cette transition éducative. Il est intéressant de constater notamment que des valeurs partagées par l’ensemble des acteurs de la communauté éducative sur les pratiques éducatives peuvent définir des leviers puissants au service des enfants. La troisième partie est une conclusion ou plutôt un plaidoyer pour repenser les pratiques éducatives au service du bien-être à l’école. Dans la lignée de l’ouvrage de Noddings (2003), Fabienne Serina-Karsky invite à faire du bien-être scolaire une question urgente qui mérite d’être prise au sérieux. Elle met avant la nécessité d’une vision systémique et complexe pour atteindre cet objectif. Autrement dit, chaque composant de l’environnement scolaire doit être attentivement examiné et pensé en relation avec le reste. À ce titre, le mouvement de l’éducation nouvelle et les innovations pédagogiques qui ont été développées dans ces établissements peuvent constituer des points d’appui intéressants. Les clés pour agir en faveur du bien-être et du mieux-être à l’école présentées par l’auteure et mis en place dans cette école parisienne sont d’ailleurs celles qui sont mises en avant dans les préconisations scientifiques à l’image du récent rapport publié par le Conseil Supérieur de l’Éducation au Québec (2020). Cet ouvrage constitue une lecture à la fois pertinente et éclairée pour tout acteur de la communauté éducative qui souhaite s’engager dans la voie de la recherche-action ou de l’innovation pédagogique et notamment en faveur du bien-être à l’école. En effet, il peut constituer une source d’inspiration pour repenser l’école et amener du sens aux pratiques éducatives où le bien-être de l’enfant devient le centre des préoccupations.

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Recension de « Pour le bien-être et la santé des jeunes » de Marie Rose Moro et Jean-Louis Brison (Odile Jacob, 2019) / Emmanuel Wassouo

Organisé en six chapitres, cet ouvrage s’appuie sur le rapport d’une mission qui a été menée par Marie Rose Moro et Jean-Louis Brison en novembre 2016, sur le bien-être et la santé des jeunes. Ce rapport est le résultat d’une large consultation à travers des entretiens avec un panel varié des acteurs qualifiés issus des domaines de l’éducation, des soins psychologiques et psychiatriques, des syndicats, des collectivités territoriales, des associations, etc. L’ouvrage part d’un constat clair selon lequel le mal-être des jeunes en France devient de plus en plus préoccupant. À titre d’illustration, le suicide est selon les auteurs la deuxième cause de mortalité des adolescents, sinon la première, car certains suicides sont souvent déguisés en accident. En effet, l’adolescence est une période de trouble et de grande vulnérabilité, brouillant par le fait même la caractérisation du mal-être. Or, la santé qui est un bien à conquérir et à conserver. Elle est liée au bien-être considéré à la fois comme un devoir et un droit.

En milieu scolaire, le bien-être est intimement lié à la dignité de l’élève et se traduit par la confiance qu’il a en lui-même, envers ses parents et l’institution scolaire. Le mal-être traduit pour sa part la souffrance et un sentiment profond de malaise des adolescents. L’école est le lieu des apprentissages, mais aussi de promotion de la santé et du bien-être des adolescents (Darlington et al., 2017 ; Simar et al., 2018). Le milieu scolaire est aussi le lieu par excellence de l’expression du mal-être des jeunes et où se construisent les alliances avec les éducateurs, les familles et les professionnels. Malheureusement, ces alliances sont souvent biaisées par les divergences des représentations du mal-être. En d’autres termes, les perceptions qu’ont les éducateurs, les parents et les jeunes eux-mêmes du mal-être, ne sont pas toujours convergentes. Ces divergences des représentations renforcent la nécessité d’un accompagnement éducatif et thérapeutique. Cet accompagnement est cependant trop insuffisant, fortement disparate et cloisonné, pour répondre avec efficacité à cette problématique de santé publique. De plus, la méconnaissance aussi bien par les parents et les professionnels des aides disponibles, est un facteur aggravant de la situation. Dans ce contexte, la mobilisation autour du mal-être d’un jeune se fait plus dans l’urgence que dans la prévention. Il y a donc une nécessité de créer une synergie entre les professionnels de l’éducation et ceux de la santé.

Le parcours scolaire des adolescents est étroitement lié à leur parcours éducatif de santé car l’épanouissement et la réussite scolaire des élèves sont fortement liés à leur bien-être. En France, la mise en place par la Direction Générale de l’Enseignement Scolaire (DGESCO) d’un portfolio numérique (FOLIOS) contenant les informations et les expériences que les élèves jugent utiles à leur santé contribue par exemple aux apprentissages et à l’amélioration de leur bien-être. De même, selon les auteurs, l’augmentation de l’offre de centres médico-psychologiques (CMP) entre 2011 et 2014, passant de 1 453 à 1 467 structures, participe aussi au bien-être des adolescents. Malgré ces efforts pour répondre efficacement aux besoins en soins psychologiques et psychiatriques de l’enfant et de l’adolescent, les délais d’attente restent très importants. En l’occurrence, les auteurs mentionnent qu’en 2008, 60% des structures de psychiatrie infanto-juvénile en France déclaraient avoir une liste d’attente pour un premier rendez-vous, contre 30% en psychiatrie générale. Entre 2014 et 2018, ce taux a été multiplié par deux. Cette situation est exacerbée par une baisse de professionnels (pédopsychiatres, psychiatres) avec un nombre élevé des départs à la retraite et un faible remplacement. Cette baisse peut s’expliquer entre autres par la faible attractivité de la profession, et une absence d’identification de la psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent comme une spécialité à part entière.

L’ouvrage s’achève avec dix propositions visant non seulement à faire du bien-être et de la santé des jeunes une priorité, mais aussi à apporter des solutions concrètes au mal-être des jeunes. De ces préconisations, il est possible de citer la création d’un Pass Santé des jeunes (P@ssSaJ) permettant aux jeunes de rencontrer gratuitement le médecin de leur choix, et bénéficier si besoin de dix séances au plus avec un psychologue. Les auteurs suggèrent un renforcement des capacités du personnel enseignant et d’éducation aux problématiques de santé des jeunes ainsi qu’à la psychologie de l’adolescent. Ces problématiques doivent également être intégrées dans la formation initiale de ce personnel. Les préconisations visent aussi le renforcement de la médecine scolaire dans les collèges et les lycées par des mesures incitatives permettant de pourvoir les postes vacants. À l’université, l’accès des étudiants à des actes de soins développé dans la loi du 8 mars 2018 relative à l’orientation et à la réussite des étudiants, est une réponse institutionnelle aux besoins de santé des étudiants. Toutefois, la prise en charge psychologique des étudiants à travers les Bureaux d’Aide Psychologique Universitaire (BAPU) gagnerait à être renforcée. Selon les auteurs, ces bureaux sont actuellement limités et fragmentés, avec par exemple seulement neuf villes universitaires de province qui disposent d’un BAPU. La prise en compte du bien-être et de la santé des jeunes est aussi tributaire de la disponibilité des ressources notamment en psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent. Dans ce contexte, il est nécessaire non seulement d’augmenter significativement le nombre de professionnels en psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent mais aussi de reconnaitre la spécificité de la psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent. La priorisation du bien-être des adolescents et des jeunes, se fera aussi selon les auteurs par le développement des maisons des adolescents particulièrement dans les zones où il n’y en a pas. L’objectif est d’assurer une bonne couverture territoriale et de contribuer ainsi à une mise en œuvre d’un pilotage national du plan « Bien-être et santé des jeunes ». Ce plan s’inscrit dans la continuité des politiques de l’État français en matière de réussite éducative pour tous, d’égalité d’accès aux soins et de précocité des prises en charge (Ministère des Solidarités et de la Santé). Il va s’appuyer sur l’Institut National de la Santé des Jeunes (INSJ) dont la création a pour but de fédérer toutes les compétences et ressources autour de la santé des jeunes. Il va également permettre la prise en compte de toutes les disciplines médicales, psychologiques, scolaires et sociales dans les actions à mener. Les questionnements soulevés par les auteurs dans l’ouvrage sont à la fois fort intéressants et d’une brûlante actualité en France. Ces dernières semaines en effet, l’actualité est marquée par de nombreux cas de violences entre adolescents (Poingt, 2021). Ces violences parfois se soldent par des pertes en vies humaines, provoquant ainsi la stupeur et l’incompréhension au sein de la société. Selon Marie Rose Moro et Jean-Louis Brison, qu’elle soit subie ou infligée, la violence chez les adolescents est l’un des signes précoces qui doit alerter sur leur mal-être. Dans cet ouvrage, des pistes intéressantes de compréhension du comportement des adolescents sont développées. Les auteurs suggèrent aussi des solutions concrètes pour comprendre et pallier au mal-être des adolescents et des jeunes. Les professionnels de l’éducation, ainsi que ceux de la santé, les parents d’élèves, trouveront dans cet ouvrage les moyens d’accompagner les adolescents et les jeunes aussi bien dans leurs apprentissages que dans leur épanouissement tout au long de leur parcours de formation.

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Appel à contribution Dans le…

Appel à contribution bien-être et développement durable

Dans le cadre du numéro 8 à venir, la revue Sciences et Bonheur lance, en partenariat avec le Centre de Recherches Interdisciplinaires (CRI), un appel à contributions sur les rapports entre bien-être des personnes et développement durable. Les thèmes des contributions pourront par exemple porter sur les indicateurs, la consommation, la biodiversité, les territoires, les biais cognitifs, les ressources en tous genres (économique, sociale, psychologique) etc.
Les contributions pourront prendre la forme de revues de questions, d’études empiriques ou de textes de réflexion. Elles devront être présentées de manière conforme aux standards de la revue Sciences et Bonheur. Les contributions ne dépasseront pas 50 000 signes (notes et références comprises).
Si vous souhaitez proposer un projet d’article dans le cadre de ce numéro thématique, merci de nous faire parvenir un résumé de 400 mots maximum de votre proposition d’article, accompagnée d’un titre, de quatre à six mots-clefs, d’une bibliographie indicative et de vos coordonnées, par courriel pour le 15 juin 2021 au plus tard à l’adresse électronique suivante : edition@sciences-et-bonheur.org
Les propositions qui auront été jugées pertinentes par la direction scientifique devront s’engager à fournir la version finale de leur texte pour le 31 octobre 2021 au plus tard. Nous attendons vos contributions !

Calendrier prévisionnel :
Remise des propositions d’articles : 15 juin 2021
Avis du comité de lecture : 30 juin 2021
Remise des articles proposés : 31 octobre 2021
Remise des articles corrigés : 31 janvier 2021
Mise en ligne des articles : 30 juin 2022

En savoir plus :
https://cri-paris.org/

Recension par Thierry Nadisic, décembre…

Recension par Thierry Nadisic, décembre 2020

Penser, travailler et apprendre autrement : les nouveaux espaces de travail, récit d’une expérimentation
Thierry Picq, Sounita Rabut, Stéphane Parisot, Bahar Demir et Anaïs Potet
Collection direction innovation emlyon business school, 2020

Nous savons que la révolution des technologies de l’information change nos façons de travailler et d’apprendre. Mais qu’est-ce cela veut dire concrètement ? Le nouveau livre « Penser, travailler et apprendre autrement » nous raconte une expérience collective au cœur de cette transformation. Il nous fait entrer dans l’intimité de l’équipe du Silex, qui a été pendant deux ans le laboratoire d’innovation de la grande école emlyon business school.

Au-delà de la description passionnante de son fonctionnement, le livre nous fait découvrir à la fois la dynamique de création et de fermeture de ce type d’organisation ainsi que ses buts et ses résultats concrets. Encore plus fondamentalement, il est une source de réflexions et d’actions pour tous ceux qui cherchent comment mieux piloter l’innovation, la pédagogie, le management et la structuration physique d’un espace de travail.

Nous apprenons que le Silex a été créé en 2017 dans le contexte favorable d’un plan de transformation stratégique et organisationnel de l’école afin de favoriser celui-ci. Il s’agissait de participer à changer une culture et des comportements pour les orienter vers un esprit d’innovation. Concrètement cela signifiait développer la capacité collective à inventer les formations, les méthodes pédagogiques et les pratiques managériales de demain. Un deuxième objectif consistait à être un test sur 1000 m2 du futur campus de l’école qui serait trente fois plus grand.

La nouvelle culture d’innovation que ce lieu aidait à construire était faite d’agilité, d’ouverture vers l’extérieur, de transversalité, de convivialité et d’esprit positif. Elle était le fondement même du nouveau référentiel de compétences que l’école venait de développer pour tous ses programmes sous le nom « early maker ». Celui-ci consistait en la capacité à entreprendre de façon collaborative en prototypant rapidement des projets combinant de nouvelles technologies au service de besoins sociétaux.

Le livre montre comment le Silex est devenu la concrétisation portée par une équipe aux multiples talents de cette culture et de ce profil de compétences. Son fonctionnement était ouvert aux émergences de toutes sortes. Il favorisait l’hybridation des personnes internes et externes à l’organisation et était orienté sur l’expérience concrète. Il montrait que les nouvelles pratiques de management centrées sur le bien-être fonctionnaient et pouvaient s’organiser dans un espace de travail ouvert et modulable aussi loin de la standardisation que des open-spaces. Une scénographie forte en symboles comme l’architecture originale des salles de réunions appelées « cases à palabres » ou l’utilisation des murs pour la transmission de messages inspirants donnaient une réalité à la finalité du lieu.

Bien sûr, les résultats concrets d’un tel laboratoire d’innovation sont aussi importants que le changement culturel qu’il active. Le livre en détaille quatre principaux. D’abord de nouveaux produits et services ont été explorés, comme des formations, des démarches d’accompagnement ou des méthodes innovation. Ensuite le Silex est devenu un incubateur en lien avec tout l’écosystème d’innovation de la ville de Lyon. De multiples partenariats y ont vu le jour. De plus le lieu a fait émerger un nouveau métier : celui d’ « expérience manager », qui permet à tous les utilisateurs d’un lieu de vivre une expérience unique et satisfaisante. La formalisation de ce métier représente en soi un résultat utile. Enfin une nouvelle démarche complète de communication faite de coresponsabilité, d’émergence et d’agilité a été construite qui peut être réutilisée dans d’autres contextes similaires d’innovation.

Au total nous apprenons que 40% des coûts du laboratoire étaient financés par le sponsoring et 20% par les prestations du Silex, dont la location d’espaces. Restent 40% dont l’évaluation du retour sur investissement est liée à la manière dont on valorise le changement culturel et comportemental et les quatre résultats concrets qui ont été présentés. A cet égard le livre montre la démarche originale de communication du Silex sur ses activités qui lui a permis de remplacer les traditionnels indicateurs de performance par des mesures d’impact auprès des publics visés.

Enfin le livre se termine par la description de la fin du Silex qui a fermé en 2019 pour de multiples raisons, négatives (comme un rejet de la part d’un réseau d’adversaires du projet) et positives (comme la volonté de réintroduire l’innovation au cœur du fonctionnement de l’école elle-même). En même temps, ce moment marque la naissance de ce que les auteurs appelent le « Silex 2 » qui consiste à continuer la démarche réalisée pendant deux ans sans la fixer dans un lieu physique. Plusieurs pistes sont ainsi dévoilées : l’utilisation des principes du Silex à la fois pour inspirer la construction du nouveau campus de l’école et pour certifier d’autres espaces de travail, de formation ou de transformation où l’innovation est centrale.

La culture française et le…

La culture française et le bonheur

Recension de « Petites mythologies du bonheur français » de Gaël Brulé, Dunod, 2020.

Attention OLNI ! Ce livre est une belle surprise, une sorte d’« objet à lire non identifié » sur le bonheur. Il nous immerge dans des couches successives de sens qui ne semblent pas connectées a priori mais dont les études scientifiques ont montré qu’elles sont en fait directement reliées. En profondeur il explique le bonheur en France vu comme la satisfaction à l’égard de la vie et qui est à un niveau relativement bas par rapport à l’ensemble des pays européens (tout juste au-dessus de celui de la Bulgarie, de l’Ukraine et de la Russie qui sont en queue de peloton). Mais il le fait en surface en décrivant des artefacts caractéristiques de notre pays, du bouchon de vin à la 2 CV. Le lien entre le bonheur et ces objets ? Les dimensions qui permettent de rendre compte d’une culture : la 2 CV par exemple est l’illustration du libertarisme. La spécificité de l’ouvrage est aussi que le choix des dimensions rendant compte de la culture française s’est fait sur le fondement de nombreuses recherches interculturelles. Selon celles-ci, six dimensions peuvent caractériser notre culture : l’attachement au passé, l’hédonisme, l’aversion au risque, la verticalité, la pulsion libertaire et l’idéalisme. L’annexe méthodologique nous montre de façon rigoureuse et exhaustive (sur près de 60 pages) la légitimité de ces mises en lien. Décrivons successivement les six ensembles « objet – dimension culturelle – impact sur le bonheur » qui sont présentés dans le livre et permettent de comprendre notre bonheur.

Le bouchon de vin représente l’attachement des français au passé, qu’ils partagent par exemple avec la Russie. 70% des répondants dans notre pays déclarent qu’ils aimeraient vivre à une époque ancienne. Ce lien fort au passé se traduit par un goût pour l’authenticité, par exemple par la valorisation du patrimoine historique, et dans les liens sociaux, où l’on a souvent peur qu’une communication fluide et positive ne soit pas sincère. Le lien fort au passé est aussi la source d’une douleur liée au fait que l’époque glorieuse du rayonnement de la France dans le monde est révolue. L’impact sur le bonheur de cette première dimension culturelle est ainsi plutôt négatif.

Le repas à la française est le symbole de notre hédonisme. C’est dans notre pays qu’on passe le plus de temps en moyenne par jour à table : 133 minutes (contre 62 pour les Etats-Unis). Et dans le monde, c’est la France qui a le score le plus élevé en ce qui concerne l’hédonisme. Les petits plaisirs de la vie, comme une discussion, un bon plat ou une pause en terrasse, représentent une dimension du bonheur. Les français sont également reconnus pour avoir développé un art de vivre subtil qui donne de l’importance à l’esthétique au quotidien (des vêtements à la décoration). La recherche du plaisir peut aussi être un raccourci superficiel menant à la dépendance et peut alors manquer de sens profond. Au total l‘hédonisme semble avoir un effet ambigu sur le niveau de bonheur français.

La clôture qui entoure une propriété est l’illustration de l’aversion française à l’incertitude. Notre triptyque diplôme – contrat à durée indéterminé – propriété et notre goût pour la bureaucratie signalent une peur du risque, de l’avenir et de l’inconnu. Celle-ci va de pair avec notre défiance de l’autre. Seulement 19% des français estiment que les autres sont dignes de confiance alors que c’est le cas de 74% des norvégiens. Le français qui se méfie a été comparé à une noix de coco (dure à l’extérieur et molle à l’intérieur), par opposition à l’américain qui ressemblerait à une pêche (où c’est le noyau intérieur qui est dur). Or les pays les plus heureux sont ceux où la confiance envers les personnes que l’on ne connaît pas est la plus élevée. L’évitement de l’incertitude a globalement un effet défavorable sur le bonheur des français, alors même que c’est la dimension culturelle qui a la plus forte corrélation au bonheur.
La classe d’école est le marqueur du lien aux autres. Il est fait en France de verticalité forte et de locus de contrôle externe. La verticalité est définie par le degré d’acceptation de différences hiérarchiques importantes. Quant au locus de contrôle, s’il est interne, on pense que ses décisions dépendent de soi, s’il est externe, on considère que ce qui arrive dépend de circonstances extérieures. Ces deux caractéristiques sont bien illustrées en France par le niveau d’attente par rapport à l’Etat qui est le plus haut de tous les pays occidentaux. Or une faible hiérarchisation de la société et un locus de contrôle interne sont des facteurs respectivement favorable et très favorable au bonheur. La classe d’école de collège où le niveau de bien être des élèves est très bas montre cette faiblesse française. Pourtant les attentes des français en matière de hiérarchie ne sont pas différentes de celles des européens du nord. C’est notamment cet écart entre préférences et réalité qui est à l’origine d’une forte remise en cause des hiérarchies.

La 2 CV est une voiture libertaire. Cet objet a été choisi pour témoigner du besoin fondamental pour la liberté vue largement comme la capacité de s’opposer aux autorités instituées. C’est en France que le niveau d’autonomie intellectuelle, qui englobe notamment cette dimension libertaire, est supérieur à celui de tous les autres pays. En même temps 32% des français aiment les leaders forts, soit plus que dans la plupart des pays occidentaux. Ils sont également proches des pays asiatiques pour ce qui est de leur rejet de l’individualisme. Enfin ils semblent n’accepter ni contrôle par les pairs (les retours des collègues au travail ne sont pas recherchés) ni le fait de voir le niveau de responsabilité augmenter au même rythme que le niveau de liberté. Cette volonté d’affranchissement vis-à-vis de ce qui est considéré comme une pression voir une oppression hiérarchique est telle qu’elle semble affaiblir ce lien à l’autre qui est pourtant une source importante de bonheur.

Enfin le journal représente la passion française pour les idées abstraites rationnelles et holistes et pour les symboles et les idéaux universels. Or l’empirisme et l’attention aux faits sont justement des caractéristiques permettant une concrétisation des idées favorable au bonheur.

En conclusion ces six dimensions ont plutôt un impact négatif sur le bonheur en France. Celui-ci est favorablement influencé par notre goût pour la liberté, les plaisirs de la vie, la beauté et l’authentique mais il est hypothéqué par le poids du passé, une verticalité pesante, un vif rejet de l’incertitude, un lien social et une vision de la responsabilité problématiques ainsi qu’une faible importante donnée aux faits concrets. Ces dimensions sont également souvent en conflit entre elles. La volonté libertaire par exemple s’oppose à la verticalité hiérarchique et étatique, ce qui produit à la fois une vision qui se veut moins individualiste de la qualité de vie et une logique de l’honneur personnelle apte à redonner un sens du contrôle en situation d’obéissance. L’effet négatif des caractéristiques culturelles françaises et leurs tensions pourraient expliquer le niveau plutôt bas de la satisfaction à l’égard de sa vie caractéristique de notre pays. C’est bien ce qu’il fallait démontrer.

Thierry Nadisic

emlyon business school, Paris, France

Professeur en comportement organisationnel, ses recherches ont pour thèmes les sentiments de justice et d’injustice, les émotions et l’épanouissement, au travail et dans la vie quotidienne. Il a récemment publié plusieurs ouvrages comme « Le management juste » (Éditions PUG-UGA, 2018), « S’épanouir sans gourou ni expert, le meilleur coach c’est vous ! » (Éditions Eyrolles, 2018) et « S’épanouir en temps de crise : 21 techniques de psychologie positive (Éditions Eyrolles, 2021). Blog et contact : www.thierry-nadisic.com

Pour citer cette recension :

Nadisic, T. (2021). Recension de « Petites mythologies du bonheur français » de Gaël Brulé, Dunod, 2020. Sciences &Bonheur, XXX.

Kaléidoscope : Introduction au numéro thématique « Des ressources physiques aux ressources psychologiques et sociales » / Antonia Csillik et Charles Martin-Krumm

Le terme ressource vient de l’ancien français « ressource » et renvoie à un secours ou à quelque chose que l’on utilise en cas de besoin. Cette définition, qui définit un moyen, est suffisamment flexible pour s’appliquer à un grand nombre de situations. On parle tout autant de ressources environnementales que de ressources individuelles, ou encore de ressources au niveau d’une communauté. Ces ressources peuvent être aussi bien matérielles qu’immatérielles, physiques que mentales voire morales. C’est donc davantage la fonction qui définit la ressource, quelque chose que l’on utilise en cas de besoin, ou alors simplement une ressource latente qui sécurise celui ou celle qui la possède. On conçoit assez spontanément que ces ressources soient importantes, voire fondamentales. Pour autant, rien n’indique que chacune mène au bien-être voire au bonheur de manière équivalente. Quelle est l’influence des ressources en tous genres sur le bonheur des individus ? Se font-elles ressentir par leur présence ou seulement par leur absence ? Comment les conceptualiser et éventuellement les mesurer ? Sans prétendre épuiser le sujet, ce sont ces quelques questions auxquelles ce numéro se propose d’apporter des réponses. Les ressources y sont tour à tour psychologiques, sociales ou environnementales, et évaluées dans des contextes et populations très différents.

Pendant longtemps, les travaux de recherche en psychologie se sont focalisés sur les ressources sociales et leurs effets protecteurs contre le stress. Dès 1995, Diener et ses collaborateurs ont complété ces modèles avec un accent mis sur leurs effets sur le bien-être. Ces derniers ont défini les ressources de manière assez large en termes d’objets ou de caractéristiques personnelles que les personnes possèdent et qu’elles peuvent utiliser afin d’accomplir leurs objectifs. Ces ressources aident les personnes à accomplir leurs besoins physiques et psychologiques et à développer, par la suite, un sens de compétence ou de maîtrise. Des modèles plus complexes ont complété ces premiers, dont celui de Carl Rogers (1954) et ceux qui sont issus de la psychologie positive. Un modèle intégratif des ressources psychologique a été proposé (Csillik, 2017, 2019). Les ressources psychologiques constituent des facteurs protecteurs qui facilitent la résistance à l’adversité, ainsi que l’adaptation psychologique dans les situations difficiles de la vie. On distingue, d’une part, les ressources psychologiques, qui sont des facteurs internes, des prédispositions psychologiques que possède une personne, et d’autre part, les ressources environnementales extérieures, dont le soutien social. Ces ressources jouent le rôle de facteurs de protection, c’est-à-dire des facteurs qui tentent de réduire l’effet du stress et qui permettent à la personne de maintenir ses compétences dans des circonstances de détresse (Csillik, 2017, 2019).

L’objectif de ce numéro thématique est de mettre en perspective les résultats des sept articles sélectionnés, dans une perspective pluridisciplinaire autour de cette notion de ressource, tout en intégrant les dernières évolutions dans le domaine. Plusieurs axes thématiques tendent à émerger. En premier lieu, les ressources physiques sont mises en lumière à travers une notion nouvellement introduite en France : la « littéracie physique ». Ce premier article de Philip Jefferies (2020) traite donc des ressources physiques, qui ont été pendant longtemps ignorées dans la littérature. Il s’agit ici de mettre en évidence les effets de la littéracie physique, qui désigne la motivation, la confiance, la compétence physique, le savoir et la compréhension qu’une personne possède sur l’activité physique et qui lui permettent de valoriser et de prendre en charge son engagement envers l’activité physique pour toute sa vie (Whitehead, 2001, 2010), sur la résilience.

Les trois articles suivants portent sur le rôle des ressources psychologiques, telles que la notion de bienveillance, qui connait un franc succès dans la littérature depuis l’introduction de ce concept en 2003 par Neff. Dans le premier article Annie Paquet et Fabien Fenouillet (2020) proposent un éclairage sur les notions de gentillesse et de bienveillance, en faisant référence à la théorie de l’autodétermination de Deci et Ryan (2004) et à la psychologie des valeurs de Schwartz (2006) avec une proposition originale des définitions de la gentillesse et de la bienveillance, ainsi que des perspectives sur leur possible relation. Fabien Bac et Antonia Csillik (2020) présentent une étude clinique empirique évaluant les effets protecteurs de plusieurs ressources internes, telles que la disposition à l’attention consciente (mindfulness), l’intelligence psychologique, le sentiment d’efficacité personnelle et l’optimisme dispositionnel contre le burnout chez les soignants en soins palliatifs. Enfin, une troisième étude menée par Marion Karras, Antonia Csillik, Patricia Delhomme et Fabien Fenouillet (2020) explore le rôle protecteur de l’empathie, en tant que ressource facilitatrice des relations humaines, qui favoriserait les comportements prosociaux et inhiberait l’agressivité des comportements routiers. L’empathie serait donc une ressource protectrice des automobilistes, ce qui pourrait ouvrir des pistes de recherche intéressantes pour la prévention des risques routiers.

Les ressources extérieures à la personne telles que les ressources sociales et celles qui sont environnementales, dont principalement la nature, sont explorées dans trois études. Dans une première étude de Amandine Junot et Yvan Paquet (2020), l’exposition à la nature est conçue comme un vecteur du bien-être humain, dans le sens où elle favoriserait la construction de ressources mises en jeu dans la hausse de la vitalité. À l’aide des théories de la restauration de l’attention, de réduction du stress, des émotions et de l’autodétermination, cet article théorique explore les voies et mécanismes psychologiques impliqués, en approfondissant leurs relations afin de les intégrer dans un cadre théorique complet et unifié, permettant d’offrir une compréhension holistique sur la construction de ressources favorables à la vitalité en environnements naturels. Une étude expérimentale menée par Barbara Bonnefoy et Laure Léger (2020) a pour objectif de tester les effets restaurateurs de la nature sur les ressources attentionnelles. Un dernier article de Gaël Brulé, Marlène Sapin et Clémentine Rossier (2020) vient compléter les autres en apportant un éclairage des cadres théoriques et analytiques issus de la psychologie, de la sociologie ou des sciences politiques sur la question des ressources externes et notamment celle des ressources relationnelles et sociales stratégiques en lien avec le bien-être subjectif des personnes. En conclusion, ce numéro thématique propose une série d’études empiriques et d’articles théoriques qui sont en faveur de cette vision organismique de l’être humain telle que postulée par Rogers et Dymond (1954), avec des interconnexions et interdépendances des ressources physiques, psychologiques, sociales et environnementales. Ces quelques éléments nous montrent que la ressource est un prisme explicatif pertinent pour questionner le bonheur, une herméneutique plastique et féconde. Pour autant, ces quelques chapitres soulèvent tout autant de questions qu’ils apportent de réponses. Des questions restent à explorer, comme celle des ressources dont disposent certaines populations particulières, telles que les adolescents ou les personnes âgées, ainsi que le rôle des ressources économiques, en lien avec la religiosité et la spiritualité etc. Peut-être, ces pans ouverts dans ce numéro seront l’objet d’un numéro futur.

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#kaleidoscope

Physical literacy and resilience: The role of positive challenges / Philip Jefferies

Littératie physique et résilience : Le rôle des défis positifs

Abstract

Physical literacy is the competence to perform movement skills combined with the motivation, confidence, and understanding to value and take responsibility for engagement in physical activity across the lifespan. It has also been defined as the foundational attributes for beginning and maintaining physical activity, and therefore the capacity for an active lifestyle. The benefits of physical literacy include enhanced health through increased physical activity, and also improvements in confidence and participation, as individuals recognise their movement competencies and engage more fully with their environments. Growing recognition of the value of physical literacy has led to global drives to involve physical literacy in multiple sectors including broadening early childhood and elementary curricula to aid child development, with proponents arguing for it to be emphasised similarly to literacy and numeracy. In parallel, educators, health professionals, and policymakers, among others, are becoming increasingly interested in ways to build resilience. Rather than addressing potential vulnerabilities and weaknesses, resilience approaches promote fostering protective factors that help individuals experiencing adversity to avoid poor default trajectories and instead achieve positive outcomes (through recovery, adaptation, or transformation). This paper explores links between the two desirable and promising constructs of physical literacy and resilience, considering their conceptual interplay and the shared notion of engaging ‘positive challenges’ that may be essential for nurturing important resources when facing subsequent adversity. This connection provides the base for further robust empirical studies that involve both physical literacy and resilience and for the development of holistic resilience programme development.

Keywords: Physical literacy; Resilience; Challenge; Adversity; Movement; Physical education; Curriculum.

Résumé

La littératie physique est la compétence des individus pour exécuter des mouvements, aptitude combinée à la motivation, à la confiance en soi et à la compréhension nécessaires pour valoriser et assumer la responsabilité de s’engager dans une activité physique tout au long de la vie. Elle a également été définie comme les attributs fondamentaux pour commencer et pour maintenir une activité physique, et donc la capacité à adopter un mode de vie actif. Les avantages de la littératie physique comprennent à la fois une amélioration de la santé grâce à une activité physique accrue, ainsi qu’une amélioration de la confiance en soi et de la participation aux pratiques sportives, car les individus reconnaissent leurs compétences à effectuer les mouvements et les intègrent plus pleinement dans leur cadre de vie. La reconnaissance croissante de la valeur de la littératie physique a conduit à des initiatives mondiales visant à l’introduire dans de multiples secteurs, y compris scolaire avec l’élargissement des programmes dispensées durant la petite enfance et ceux du cours élémentaire, afin d’aider au développement de l’enfant. Les partisans de la littératie physique plaident pour qu’elle soit considérée de la même manière que la littératie et la numératie. Parallèlement, les éducateurs, les professionnels de la santé et les décideurs politiques, entre autres, s’intéressent de plus en plus aux moyens de renforcer la résilience. Plutôt que de s’attaquer aux vulnérabilités et faiblesses potentielles des personnes, les approches fondées sur la résilience favorisent la promotion de facteurs de protection qui aident les personnes confrontées à l’adversité à éviter de s’engager dans des trajectoires de vie négatives et à obtenir des résultats positifs (par le biais du rétablissement, de l’adaptation ou de la transformation). Cet article explore les liens entre ces deux concepts prometteurs que sont la littératie physique et la résilience, tout en tenant compte de leurs interactions conceptuelles et de leur notion commune qui est de s’engager dans des « défis positifs » qui peuvent être essentiels pour nourrir des ressources importantes face à l’adversité ultérieure. Ce lien fournit la base pour d’autres études empiriques robustes qui impliquent à la fois la littératie physique et la résilience et soutient le développement de programmes holistique de résilience.

Mots-clés : Littératie physique ; Résilience ; Défi ; Adversité ; Mouvement ; Éducation physiques ; Curriculum.

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#article

Gentillesse et bienveillance comme ressources psychologiques / Annie Paquet et Fabien Fenouillet

Kindness and benevolence as psychological resources

Résumé

Cet article propose un éclairage théorique des notions de gentillesse et de bienveillance en mêlant la théorie de l’autodétermination de Deci et Ryan (2014) et la psychologie des valeurs de Schwartz (2006). À partir d’une revue de littérature de ces concepts appartenant au sens commun, une proposition personnelle des définitions de la gentillesse et de la bienveillance, ainsi que de leur relation, est faite. Après une exploration des bénéfices respectifs de la gentillesse et de la bienveillance, ces deux notions sont envisagées comme ressources psychologiques individuelles avec des évidences empiriques en ce sens pour la gentillesse et le constat de la nécessité de recherches supplémentaires pour la bienveillance.

Mots-clés : Gentillesse ; Bienveillance ; Valeur ; Motivation ; Théorie de l’autodétermination ; Ressource psychologique.

Abstract

This article clarifies the notions of “kindness” and “benevolence” by combining the self-determination theory of Deci and Ryan (2014) and the value psychology of Schwartz (2006). Based on a literature review of kindness and benevolence, their relationship and respective benefits is explored. Then, a proposal is made to define the two concepts based on their unique underlying motivations. While empirical evidence supports recognizing kindness as a psychological resource, more research is needed to recognize benevolence as such.

Keywords: Kindness; Benevolence; Value; Motivation; Self-Determination Theory; Psychological resource.

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#article

Les ressources psychologiques, facteurs de protection pour les soignant·e·s confronté·e·s à la fin de vie ? / Fabien Bac et Antonia Csillik

Are psychological resources protective factors for caregivers facing end of life in palliative care settings?

Résumé

Le syndrome d’épuisement professionnel, ou burnout, apparait comme un phénomène majeur de société dans les années 80. Dès l’émergence de ce concept, les professionnel·le·s au contact des malades ont été considérés comme parmi les plus à risque, en particulier celles et ceux confronté·e·s de façon récurrente à la mort de patient·e·s. Si les facteurs précipitant ou favorisant l’épuisement professionnel, le stress et l’anxiété des travailleurs et travailleuses ont été largement étudiés dans la littérature, très peu de travaux, dans un contexte francophone, se sont intéressés aux ressources psychologiques de l’individu pour contenir l’épuisement professionnel. Tel est l’enjeu de cette étude, sur une population de soignant·e·s exposés de façon régulière à la mort de patient·e·s. Des mesures de l’anxiété et de la dépression, du burnout et de quatre ressources psychologiques (disposition à l’attention consciente, intelligence psychologique, sentiment d’efficacité personnelle et optimisme dispositionnel) ont été réalisées auprès de 31 personnels soignants en milieu hospitalier. Parmi les personnes interrogées, 42% étaient infirmiers ou infirmières, 23% aides-soignant·e·s et 19% médecins. De plus, 19% travaillaient en Équipe Mobile de Soins Palliatifs (EMSP), 48% dans un service d’hospitalisation conventionnelle et 29% dans un service d’hospitalisation programmée. Des analyses de régression linéaire multiples ont été menées pour mettre en lien ces différentes variables. Le sentiment d’efficacité personnelle apparait comme un facteur protecteur contre la dépression (β = -.44, p < .01) et la disposition à l’attention consciente (mindfulness) comme un facteur protecteur contre l’anxiété (β  = -.48, p  < .01). Le niveau d’insight, une des dimensions de l’intelligence psychologique, apparait comme un facteur explicatif et protecteur contre une des dimensions de l’épuisement professionnel : la dépersonnalisation (respectivement : β = -.53, p < .01 et β = -.33, p < .05). La disposition à l’attention consciente favorise le sentiment d’accomplissement personnel (β = .47, p < .01). Finalement ces résultats invitent à s’intéresser aux ressources protectrices de la santé mentale de populations soignantes hospitalières, qui pourraient être ainsi cultivées dans une optique de prévention du burnout.

Mots-clés : Psychologie positive ; Ressources psychologiques ; Soignants ; Soins palliatifs ; Épuisement professionnel ; Dépression.

Abstract

Burnout is a major social phenomenon. Since the emergence of this concept in the 1980s, professionals in contact with patients were considered to be among the most at risk for burnout, especially those who repeatedly confronted patient death. Though antecedents to burnout have been widely studied in the literature, very little work has focused on workers’ resilience, the psychological resources internal to the individual that prevent burnout, in a francophone setting. The aim of this study is to investigate resilience in a sample of caregivers regularly exposed to patient death. Anxiety, depression, burnout, and four psychological resources (mindfulness, psychological mindedness, sense of self-efficacy, and dispositional optimism) was measured in 31 hospital caregivers. Among the sample, 42% were nurses, 23% assistant nurses, and 19% doctors. In addition, 19% worked in a palliative care team, 48% in a conventional hospitalization service, and 29% in a scheduled hospitalization service. Multiple linear regression analyzes were conducted to link these different variables. Sense of self-efficacy is a protective factor against depression (β = -0.44, p < .01), and mindfulness a protective factor against anxiety (β = -.48, p < .01). The level of insight, one of the dimensions of psychological mindedness, is an explanatory and protective factor against depersonalization, one of the dimensions of professional burnout (respectively: β = -.53, p < .01; β = -0.33, p < .05). Mindfulness promotes a sense of personal accomplishment (β = .47, p < .01). These results encourage us to cultivate the resilience of hospital healthcare populations in order to prevent burnout.

Keywords: Positive psychology; Psychological resources; Healthcare team; Caregivers; Palliative care; Burnout; Depression.

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#article

L’empathie est-elle une ressource protectrice sur la route ? / Marion Karras, Antonia Csillik, Patricia Delhomme et Fabien Fenouillet

Is empathy a protective resource on the road?

Résumé

L’empathie serait une ressource facilitatrice des relations humaines dans la mesure où elle favoriserait les comportements prosociaux et inhiberait l’agressivité. Les objectifs de cette étude sont d’explorer les qualités psychométriques du Short-FTEQ, adaptation française du Toronto Empathy Questionnaire (TEQ) et d’investiguer le rôle protecteur de l’empathie dans les comportements routiers. À cette fin, 550 automobilistes ont rempli un questionnaire papier-crayon évaluant l’empathie et les comportements routiers. Corrélations et régressions hiérarchiques montrent que l’empathie prédit positivement les comportements de conduite prosociaux. Une analyse en clusters identifie deux groupes d’automobilistes : ceux dits « à risque faible » et ceux dits « à risque élevé », les seconds étant moins empathiques, rapportant moins de comportements prosociaux mais plus d’infractions, d’accidents et de points de permis perdus que les premiers. L’empathie serait donc une ressource protectrice des automobilistes ce qui pourrait ouvrir des pistes de recherche intéressantes pour la prévention des risques routiers.

Mots-clés : Empathie ; Comportements de conduite prosociaux ; Infractions ; Risque ; Ressources protectrices.

Abstract

Empathy facilitates human interactions since it promotes prosocial behavior and inhibits aggression. The aim of this research is to investigate the protective role of empathy in road behavior. To this end, 550 French motorists completed a questionnaire assessing road behavior and empathy, as measured by the Short-FTEQ, the French adaptation of the Toronto Empathy Questionnaire (TEQ). Correlations and hierarchical regressions showed that empathy positively predicts prosocial driving behavior. A cluster analysis distinguished two groups of motorists: “low-risk” and “high-risk,” the latter reporting less prosocial behavior while having more traffic violations and accidents. Therefore, empathy protects motorists: it promotes safe driving behavior and inhibits risky behavior. This study could open new research avenues in the prevention of dangerous driving behaviors and the promotion of road safety among high-risk populations such as reoffending drivers.

Keywords: Empathy; Prosocial driving behaviors; Violations; Risk; Protective resources.

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#article